Salariat déguisé : tout ce que vous devez savoir
Le salariat déguisé est une situation dans laquelle un auto-entrepreneur est soumis aux ordres et conditions de travail imposés par un client (le donneur d’ordre). Quels sont les cas de salariat déguisé ? Quels sont les risques encourus pour l’auto-entrepreneur ? On vous répond et on vous livre les précautions à prendre !
Salariat déguisé : des auto-entrepreneurs pas si indépendants
Par définition, le micro-entrepreneur (aussi appelé auto-entrepreneur) n’est pas un salarié. C’est un travailleur indépendant qui est libre d’accepter ou non les missions qui lui sont proposées. Il ne signe aucun contrat de travail avec son client.
Lorsqu'un auto-entrepreneur est confronté à du salariat déguisé, ses conditions de travail ne sont plus libres. En effet, il est sous tutelle du client donneur d’ordre.
Deux critères sont utilisés pour définir le salariat déguisé :
- Un critère économique : l’indépendant est contraint à répondre aux missions d’un seul client. Son chiffre d’affaires dépend de ce dernier et il peine à développer sa clientèle (ou cela lui est interdit par le client donneur d’ordre).
- Un critère juridique : il existe un lien de subordination entre le travailleur indépendant et le client d’honneur d’ordre. La subordination juridique consiste en « l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné » selon la Cour de Cassation le 13 novembre 1996.
Concrètement, l’auto-entrepreneur en situation de salariat déguisé se voit contraint de respecter les conditions de travail et les règles établies par son client donneur d’ordre, comme le ferait un salarié.
Information importante
Bien qu’une entreprise qui travaille avec un auto-entrepreneur ait le droit de lui fixer des objectifs et des délais, elle ne peut en aucun cas gérer quotidiennement l’organisation du professionnel freelance à qui elle fait appel, ni lui interdire de travailler avec d’autres entreprises.
Comment reconnaître une situation de salariat déguisé ?
Il est parfois compliqué d’appréhender les limites entre auto-entrepreneuriat et salariat. Pour ne commettre aucun impair, voici les règles à suivre !
Pour comprendre s’il existe un lien de subordination entre l’auto-entrepreneur et son client, il faut évaluer la relation entre les deux parties. Pour la justice, il existe plusieurs moyens de comprendre qu’un auto-entrepreneur est (ou devient progressivement) un salarié dissimulé.
Voici quelques exemples de situations qui démontrent que l’indépendant est plutôt considéré comme salarié :
- Il est soumis aux horaires du client donneur d’ordre et n’a donc plus aucune liberté dans l’organisation de son emploi du temps
- Il exerce son activité dans les locaux et utilise le matériel de l’entreprise
- Il participe systématiquement aux réunions, il doit « rendre des comptes »
- Les congés lui sont imposés
- Il reçoit des sanctions s’il ne rend pas des comptes à l’entreprise
- Il a exactement le même rôle qu'un salarié : on lui donne une adresse électronique propre à la société, il dispose d'un badge de l'établissement, fait partie de l'organigramme de l'entreprise, etc.
- L’entreprise emploie des salariés pour réaliser exactement la même activité que lui.
En bref, il perd l’autonomie et la liberté liées à son statut.
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Les risques du salariat déguisé pour l'auto-entrepreneur
Un auto-entrepreneur considéré comme salarié déguisé peut vite se retrouver dans une situation de précarité :
- Il n’est plus maître de son temps, qu’il dédie à son client « employeur » : cela l’empêche de trouver des clients, pourtant indispensables à la viabilité économique de son entreprise.
- Il fournit un travail égal, voire supérieur à celui d’un salarié, mais… il n’est pas protégé par un contrat de travail : pas de mutuelle, pas les mêmes indemnités journalières en cas d’arrêt maladie, pas de congés payés etc.
- Le freelance est financièrement dépendant de son client. Si cette collaboration s’arrête, il se retrouve dans une situation complexe puisqu’il ne possédera plus de rémunération.
Notez également qu’en tant qu’auto-entrepreneur, vous risquez d’être soumis à certaines régularisations :
- Le remboursement des prestations sociales et des allocations chômage éventuellement touchées durant cette période de salariat déguisé
- La requalification de votre prestation en contrat de travail
En revanche, vous ne serez pas concerné par les poursuites judiciaires, contrairement à votre employeur.
Les risques du salariat déguisé pour le client
Selon l’article L8221-5 du Code du travail, le salariat déguisé constitue un délit. Afin d’être exonérées du paiement des charges sociales, les sociétés font appel aux auto-entrepreneurs pour réaliser des missions s’apparentant à du salariat. Cependant, en cas de conflit entre les deux parties ou de dénonciation d’un cas de salariat déguisé, les entreprises le pratiquant sont lourdement punies par la loi.
Le client donneur d’ordre, qui a agi en réalité comme un employeur, peut être condamné à verser :
- Les salaires et indemnités (congés, heures supplémentaires, primes…) correspondant à un poste équivalent, depuis le début avéré de la relation de travail.
- Les cotisations sociales dues à l’Urssaf : l'employeur sera amené à régler à l'administration les cotisations sociales dont il aurait dû s'acquitter si la mission du freelance avait été réalisée par un salarié.
- Des indemnités de licenciement et des dommages et intérêts, en cas de rupture de contrat.
De plus, le tribunal des prud’hommes peut requalifier la mission de l’auto-entrepreneur en contrat de travail.
Information importante
Les sanctions les plus importantes pour l'entreprise peuvent aller jusqu’à une suppression des aides publiques pendant 5 ans, un remboursement des aides publiques perçues au cours des 12 derniers mois, une peine d’emprisonnement de 3 ans et une amende de 225 000 € (45 000 € pour une personne physique).
Salariat déguisé : précautions et recours
Le meilleur moyen pour un auto-entrepreneur d’éviter cette situation est de garder son indépendance vis-à-vis de l’entreprise qui fait appel à ses services.
De par son statut, le travailleur indépendant ne doit pas se laisser imposer les conditions d’exécution de sa mission par un tiers. La relation doit se faire d’égal à égal. D’aucune façon, un lien de subordination ne doit apparaître entre le client et l’auto-entrepreneur.
Pour se protéger, l’auto-entrepreneur peut rédiger un contrat de prestation de services. Ce contrat contient les informations suivantes :
- L’identité du micro-entrepreneur qui exerce la prestation de service et celle du client (nom, coordonnées, forme sociale, adresse, numéro d’immatriculation)
- Le début et la fin de la prestation
- Les tarifs appliqués pour la mission
- Les obligations des deux parties
- Les clauses prévues en cas de litige
Le contrat de prestation de service
Si vous vous trouvez dans les situations évoquées précédemment (si vous perdez l’autonomie et la liberté de votre statut, si vous devez rendre des comptes à votre client ou encore si vos congés sont accordés par l’entreprise), nous vous conseillons de vous rapprocher du Conseil de Prud’hommes de votre département. Constituez votre dossier avec tous les éléments en votre possession pour appuyer votre demande.
Vous travaillez pour le compte d’un seul client et celui-ci vous accapare votre temps ? Un lien de subordination existe entre vous deux ? Vous êtes désormais conscient des risques encourus par le salariat déguisé. Faites donc en sorte de prendre les précautions nécessaires avant de commencer un projet !
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