Les auto-entrepreneurs sont au cœur de plusieurs nouvelles mesures ouvrant vers davantage de protection sociale. La Ministre du Travail a précisé le contenu de la réforme de l’assurance chômage au début du mois de mars, avant de la présenter ce mois-ci en Conseil des Ministres. L’ensemble des détails seront connus dans les semaines à venir après le vote définitif du texte au Parlement.
Une allocation forfaitaire sous conditions
Alors qu’Emmanuel Macron avait annoncé pendant sa campagne qu’il souhaitait une assurance chômage universelle avec extension aux indépendants et aux démissionnaires, les récentes annonces de la Ministre du Travail limitent l’indemnisation de ces derniers au versement d’une allocation forfaitaire. Plus de 3 millions d’indépendants exercent des professions variées telles qu’agriculteurs, professions libérales, commerçants ou auto-entrepreneurs sur le territoire français.
Les auto-entrepreneurs dont l'activité aura fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire ou d'une procédure de redressement judiciaire pourront bénéficier d’une allocation plafonnée à 800 €, durant 6 mois maximum. Seuls ceux ayant un bénéfice* annuel de 10 000 € (le montant précis n’a pas été communiqué à ce jour) durant l'année y seront éligibles. Cette mesure sera octroyée sous conditions de ressources, afin qu’il ne soit pas possible de la cumuler avec d’autres revenus.
« Cette évolution facilitera les transitions professionnelles, qui seront de plus en plus fréquentes et nécessaires, notamment entre le salariat et le non-salariat »
Muriel Pénicaud, Ministre du Travail
Pour les salariés démissionnaires : le gouvernement souhaite proposer un droit à l'indemnisation chômage de deux ans (trois ans pour les seniors) pour les personnes ayant au moins 5 ans d'activité ininterrompue dans l'entreprise, si elles veulent créer leur société ou changer de métier.
L’ensemble de ces mesures seront financées directement grâce aux impôts, et à la hausse de la CSG. L’introduction d’une indemnisation sur la base d’un forfait est une première dans le secteur de l’assurance chômage, qui était jusqu’ici délivrée en fonction des revenus perçus individuellement durant la période d’activité.
*Le "bénéfice" pour un auto entrepreneur correspond à son CA - abattement.
Quid de ceux travaillant auprès de plateformes collaboratives ?
Ils semblent être les grands oubliés de la réforme. En effet, les dispositions énoncées précédemment ne permettront pas à 80 % d’entre eux de bénéficier de l’allocation forfaitaire promise selon la Fédération des auto-entrepreneurs. De plus, presque aucun auto-entrepreneur n’a recours à une liquidation judiciaire à cause de la lourdeur de la procédure et de son inadaptation aux entreprises à faible chiffre d’affaires.
Des mesures vraiment efficaces ?
Les annonces de la Ministre du Travail ont été accueillies froidement par les représentants des auto-entrepreneurs. Ces derniers critiquent la faiblesse des mesures annoncées, et le manque d’incitations en faveur de l’entrepreneuriat.
Alors que les indépendants sont souvent obligés de prendre des risques importants pour lancer leur activité et piocher parfois dans leur épargne personnelle, la couverture chômage promise ne peut excéder 4 800 €, ce qui est souvent largement inférieur aux sommes investies.
Surtout, la justification d’un bénéfice d’environ 10 000 € sur l'année réduit encore la quantité d’individus couverts, dans la mesure où de nombreuses activités déclinent durant leur première année d’existence. Les entrepreneurs dans cette situation ne bénéficieront d’aucune aide. Les garanties apportées par l’Etat sont donc plutôt limitées au regard des risques à prendre pour se lancer dans un projet auto-entrepreneur.
Le Parlement peut encore modifier les choses
Les mesures présentées par le gouvernement ne sont pas encore définitives, et doivent dorénavant faire l’objet d’un débat au Parlement à partir de la mi-avril. Les nombreux amendements issus des divers travaux parlementaires sont susceptibles d’adapter encore la réforme. Le gouvernement a d’ores-et-déjà précisé qu’il n’aura pas recours aux ordonnances pour réformer l’assurance chômage.